jeudi 30 octobre 2008

181 à 190 - Textes de Raphaël Zacharie de Izarra

181 - Un poison candide

Elle a le sourire mutin, le geste puéril et la mèche fringante. Deux prunelles venimeuses qui effraient déjà les hommes. Et font rougir le diable. Voilà une innocente au bord de l'enfer qui joue avec le feu, à peine consciente. Une âme d'enfant dans un corps de sorcière...

C'est une fleur qui s'éveille, douce, fragile, pubère. Et sanguine, vénéneuse, redoutable. C'est une eau vive qui jaillit, fraîche, chaste, prude. Et trouble, écarlate, insolente.

En ces traits gracieux et paisibles on sait de futures amours pleines de promesses trahies, de rendez-vous sous l'orage, d'étreintes impies, d'infidélités ostensibles et de serments voilés. Dans ces cheveux trop fins, trop longs, trop clairs, on devine déjà l'empreinte des baisers égarés, des brins de paille oubliés, avec la brise tardive du soir pour les chasser. Et puis des senteurs de musc dans le cou. Et un ou deux jaloux pour le lui reprocher.

Les robes blanches du jour alterneront avec les coupables échancrures de la nuit. Les ébats éhontés au fond des théâtres, les étreintes furtives aux coins des monuments, les baisers de voleur derrière les portes cochères et les soupirs indus destinés aux oiseaux de passage succéderont aux heures interminables passées à bayer sous les étoiles en sempiternelles compagnies : amants de longue haleine et inconnus fiévreux se croiseront sous les dentelles de ce démon sans défense. Inconstance innée et pouvoir insidieux de la femme ! Tant d'années glorieuses à venir... L'ange a hérité de la beauté des damnées. La créature terrestre prend forme. Et elle a toute une vie de femme à faire.

C'est une pucelle de quinze ans.

182 - Enigmatique et ambigu

Dans mes yeux mystiques pénètre la lumière du monde et des étoiles. Mon regard qui se pose sur vous est un perpétuel point d'interrogation.

Les initiés voient dans mon oeil une lueur sacrée, comme si j'étais le vivant autel de quelque divinité. Les méfiants me supposent messager des enfers, soupçonnant un mauvais mystère au fond de mes prunelles.

Certains admirent mon aspect racé, mes formes élégantes, ma face pleine de distinction. D'autres craignent mon ombre qui passe, mon pas silencieux, mon air subtil. Il est vrai que si la société des gens bien nés ou fortunés fait mon affaire, me roulant dans de la soie entre le salon d'une comtesse et le bureau d'un archiduc, j'évolue avec autant d'aisance en pires compagnies. Et, indifférent à tout, perdu dans mes pensées obscures, je trouve également mon bonheur dans un taudis.

Rien ne m'atteint au fond de mon silence et de ma solitude. Et si j'ai l'air dédaigneux envers mes hôtes c'est que, accueilli chez le riche dans un fauteuil de style où je laisse mon empreinte douteuse ou bien chez le pauvre où je crache dans un méchant panier percé, partout on me traite comme si j'étais un dieu. L'humble comme le fortuné me flattent avec une égale dévotion. Ils me prodiguent louanges et caresses à n'en plus finir, même si la plupart du temps je demeure de marbre, observant de loin durant des heures entières mes bienfaiteurs.

C'est surtout dans ces moments interminables et silencieux où j'observe que l'on me prend pour une divinité. Bénéfique pour les uns, méchante pour les autres.

On m'a donné le nom de chat.

183 - Les misères de la laideur

Mademoiselle,

Votre hymen intact ayant traversé les ans avec gloire et trompettes, vous n'en êtes pas plus honnête pour autant. Le vice masqué vous plaît. La fange, pourvu qu'elle se voile de chastes atours, vous agrée.

Vous êtes laide. Laide et corrompue. Méchante et perverse. Les âmes naïves vous aiment et les coeurs puérils vous encensent sans compter pour les dignes apparences que vous arborez. Moi je vois non seulement les traits de votre visage ingrat, mais encore la noirceur de votre âme aigrie. Si vous étiez belle, vous seriez une sainte. Mais vous êtes laide, et vous êtes un démon.

Les bigotes vous prennent pour un modèle de vertu. Le bon prêtre auprès de qui vous faites si bonne figure, dupé par votre piété mensongère, vous croit pleine de valeur. Comme si votre absence de joliesse conférait quelque beauté à votre âme... A la beauté va la vertu, à la laideur va le vice. Vous êtes née laide, vous mourrez damnée. Vous avez beaucoup reçu en disgrâce, il vous est donc beaucoup demandé en échange.

Mais vous êtes faible, et vous préférez la facilité. Votre malheur était pourtant prometteur. Vous l'avez gâché. Vous n'avez pas su contrer le vice. Le combattre vous aurait grandi. Mais vous l'avez adopté.

Vous êtes laide en dehors, laide en dedans.

184 - La brique et le lierre

Je me suis vu sous des ombrages qui me sont chers, en un lieu oublié, connu de mon enfance seule. Et sous ces feuillages mouvants d'un été ancestral, des instants prestigieux de ma jeune existence se sont écoulés, paisibles et tendres. Cette terre en souvenance, cet éden humblement foulé par l'âge puéril, ce jardin de nostalgie, c'était un parc, celui d'un château.

Les frondaisons qui ondulaient sous la brise chaude rivalisaient de majesté, de gloire et de grandeur séculaire avec la façade claire du château. Je me souviens particulièrement de ses murs élevés, de ses fenêtres innombrables, de son aspect magistral et gracieux comme d'un paysage quotidien, familier, rassurant. Ces images m'envoûtent comme lorsqu'on retrouve, une fois adulte, une ambiance ensevelie dans la mémoire se rapportant aux heures innocentes de la vie.

Où me trouvais-je ? Qui étaient les hôtes de ce château ? Quel âge avait ma jeune âme ? Et ce château, était-ce, réellement un château ou bien un rêve, une fantasmagorie d'enfant ?

Plus tard j'ai retrouvé ces lieux perdus. J'ai goûté à plein coeur ces saveurs idylliques, j'ai senti le poids incomparable de la pierre érigée à glorieuse hauteur, j'ai eu chaud sous le souffle refroidi des passions d'antan, éteintes depuis un siècle. J'ai reconnu les verdures estivales apprises je ne sais où, je ne sais quand, et j'ai eu l'ivresse d'un jour, l'ivresse mélancolique. J'ai retrouvé mes chimères. C'était sous le règne de l'Amour, c'était au temps de l'indélébile illusion. La rencontre enchanteresse de la vigne vierge avec le vieux mur de briques rouges. Ce que l'on nomme communément : le lierre. Sur la pierre.

Un pan de mur ombragé par un bouquet de feuilles et quelques soupirs. Un pan de vie jamais effrité, toujours debout, dignement illustre, auguste, sans âge. Intact. Inébranlable.

Mais laissez-là mes briques, mes feuilles et mes larmes, aujourd'hui j'ai besoin d'être aimé pour une raison qui vaille, enfin : pour rien.

185 - Le violoncelle

Chère amie,

En ce jour de pluie Euterpe est à l'honneur : le violoncelle déverse ses larmes molles et sucrées, sanglotant comme un gâteau sénile. J'entends sa satanée mélodie. Quelque chose de dominical, poussiéreux, mortel... Il me parle et j'écoute ses fadaises : de la salade morose mêlée de confiture. Dessert de l'âme exquisément écoeurant. Le mets indigeste éveille en moi des appétits inédits : votre nom soudain est délectable.

Effet étrange des états d'âme morbides, alchimie mystérieuse des saveurs honnies...

L'archet est un peu plus rapide. Les cordes s'agitent et peu à peu la guimauve durcit, le miel devient marbre, la courbe se brise... Et j'entends des sons de silex. Alors votre image banale s'estompe, vous devenez plus linéale. Une tige.

Perçantes et plaintives, les notes vous habillent d'épines. L'instrument se fait de plus en plus viril, et vous m'apparaissez avec un sourire écarlate.

Des sons sortent des ténèbres, lourds et solennels. Porté par ces ailes sombres et majestueuses, je m'affranchis des quotidiennes pesanteurs. Etat de grâce... Vu d'en haut vos traits sont plus flous. Transfigurés.

Les sons montent, montent...

La musique se fait aiguë, aiguë... Si aiguë que le rêve se brise !

Comme une corde trop fine qui se casse.

Et à travers le chant strident de l'instrument redevenu source de migraine, je crois entendre vos sempiternelles jacasseries.

186 - Le feu du diable et le saut de l'ange

Madame,

Afin de mieux vous éclairer ici sur les événements et que cela éveille votre coeur à l'humaine pitié, et qu'il se rallie ainsi d'emblée à ma cause, je vais vous narrer un fait lyrique des heures heureuses de ma vie avec votre rivale.

Sachez qu'autrefois, à la faveur d'une grâce divine sans doute, je fus maître des cieux chartrains. C'était en mars 1992, et j'étais accompagné de ma mie, charmante jeune personne à l'époque qui partageait les jours de ma vie, et mon alcôve. Il s'agissait bien entendu de ma très chère et très aimée Isabelle. Oui, j'ai foulé d'un pas glorieux -et nocturne- l'illustre toit du monument sacré de la vieille cité. Explication : j'ai violé l'espace interdit à partir duquel j'ai pu par la suite accéder à un échafaudage (des travaux de rénovation avaient lieu) menant directement sur le toit de la cathédrale. C'était au début de notre relation, et en ce temps la fortune ne cessait de nous être favorable. Privilège, semble-t-il, réservé aux neufs amants.

Toutes mes frasques, toutes mes romanesques tentatives, étrangement, dépassaient mes espérances. Bref, j'avais lors de cette singulière expédition sur le toit de la cathédrale de Chartres pour uniques complices la sélène lueur, la muette escorte des statues croisées au fil de l'ascension, et ma douce amante à mon bras, sorte de Juliette enchaînée à mon destin de bouffon et d'acrobate.

En ces prestigieuses et illicites hauteurs, nos coeurs unis volaient, planaient, s'émerveillaient au-dessus de la ville endormie. Nous avions la sensation d'une félicité inconnue jusqu'alors, étrangère de nous-mêmes et du monde. En vérité nous étions devenus comme des dieux, des anges, des séraphins, le temps d'un tourbillon inoubliable de nos consciences anesthésiées par l'amour mutuel.

De cette escapade insolite, nous avions rapporté une clef, objet trouvé aux hasards des portes rencontrées, franchies ou non, mais qui nous paraissaient toutes célestes là-haut (nous avions arpenté les couloirs multiples de la cathédrale, passé quelques portes, et escaladé les nombreux escaliers cachés dans les tours, et les divers sommets). Cette clef fut longtemps notre secret. Elle demeure visible et palpable aujourd'hui, matérielle, telle une preuve tangible et dure comme l'acier de notre amour originel. Elle gît en un coin oublié de ce lieu d'où je vous écris cette lettre. Partagez donc avec moi le secret de l'existence de cette clef. Soyez le témoin de cet intime trophée arraché au ciel chartrain, symbole d'un amour mémorable.

Et aujourd'hui avec les événements, le passé qui s'éloigne, se renforce ma mémoire aimante envers certaines pierres millénaires. Celles d'une cathédrale de France un instant de ma vie approchée, et caressée : vous savez laquelle maintenant. J'ai gardé la certitude du beau, de cette beauté effleurée, sentie, et qui est plus durable que la pierre elle-même qui l'exprime.

Au contact intime de ce noble édifice, j'ai acquis un trésor humble et magnifique à la fois : des visages de pierre aux allures gothiques gravés dans mon esprit, jadis témoin. Et aujourd'hui ces statues jamais oubliées me parlent. Elles me rappellent les temps bénis où nous venions les saluer, elle et moi, avec espièglerie et insouciance. Nous accédions ainsi jusqu'au faîte du monument, aidés par quelque génie céleste complice et protecteur.

Depuis le parvis je convoitais les hauteurs où, glorieux, trônaient ces rois de pierre. Et, poussé par je ne sais quelle force du ciel, j'atteignais avec ma tendre complice leur visage et nos regards se croisaient enfin de près, de tout près. Des ailes pieuses assurément, à travers un échafaudage providentiel et une surveillance négligente, nous amenaient à hauteur de ces saints figés.

Combien il m'était aisé en ces temps d'aller vérifier de si près le sourire plein d'onction de ces lointaines silhouettes haut perchées ! Je me jouais alors des gargouilles hors d'atteinte pour rejoindre ces inaccessibles statues. Pour les profanes intrigants, pour les coeurs sans fantaisie, la mission eût parut impossible, et sans intérêt d'ailleurs. Mais moi j'avais le coeur en plein éveil et tout me devenait possible sous l'oeil de Cupidon. Et aujourd'hui, alors que je vous écris cette lettre, sachez que ces têtes immortelles me rappellent.

J'aimerais prendre par la main Isabelle et l'emmener, comme avant, jusqu'à la cime de l'une de ces églises gothiques, afin de sanctifier une seconde fois notre amour et de le sauver définitivement à travers l'ivresse poétique. Oui, j'aimerais faire revivre ainsi cette union qui a pris racine sur cette Terre il y a plusieurs années, et qui doit naturellement se déployer vers le céleste horizon. J'aimerais faire cela sous le regard pétrifié et approbateur d'un de ces bienveillants témoins ancestraux rencontrés là-haut jadis, à Chartres.

Parce que mon destin éphémère s'est lié aux têtes moyenâgeuses depuis le jour où elles se sont penchées sur moi en 1992.

Mais un jour, peut-être, j'irai retrouver les hauteurs inviolables de mon passé, à Chartres. Je m'approcherai ce jour-là une nouvelle fois encore, la dernière, du point le plus élevé de la cathédrale. Plus près du Ciel. Et plus loin du sol.

Et puis, plein d'une définitive résignation, du haut de mon perchoir sanctifié par les siècles je saluerai le monde avant de répondre à l'appel irrésistible du vide. Et mon corps défait et inerte se retrouvera en communion intime avec la pierre usée, en bas, tout en bas du saint édifice. Je serai alors au pied de l'édifice de ma vie. Et ce sera tout.

Parce que j'ai connu par le passé l'ineffable émoi provoqué par l'amour, là-bas à Chartres, au sein de la cathédrale, et que je n'ai jamais pu oublier ce vif instant d'éternité, j'irai mourir en cet endroit du monde où est demeuré pour toujours mon coeur touché à mort.

Ma chute me sera plaisante comme le vol d'un chérubin. Un coup d'aile, certes furtif et funeste, mais qui me fera survoler les siècles, les illusions et la souffrance. Ma gloire, qui durera une seconde ou deux, sera intemporelle, universelle, absolue.

Et j'inviterai le souvenir de Isabelle, le souvenir de son nom, de son visage, de sa voix et de son sourire à ce banquet d'azur, de désespoir et d'amour mêlés. Je serai réconcilié avec l'Univers entier, et durant une seconde ou deux, le temps de ma chute, tout me semblera beau, enfin. Suprêmement. Fatalement.

187 - Le plomb de l'amour

Retour en arrière : 1992, le Mans. Année faste. Ma vie bifurque, chavire, s'engage, s'allège : je suis deux.

Dans le Jardin des Plantes de la ville, elle et moi nous scellons par les sangs croisés notre hyménée. A la manière des gitans. C'est viril, romantique, puéril et poétique. Je suis alors au faîte de ma gloire, parvenu à la porte de l'Olympe. A travers les lèvres de l'amante je suis en possession de la clé du Temps : passé et futur se diluent dans la paix nouvelle d'un Présent partagé, sous la forme d'un premier baiser. Bref, mon coeur bat.

Le monde prend la couleur de ses yeux clairs et cérulescents. Mon univers, sacralisé, ne s'ancre plus dans l'espace physique mais dans la profondeur de mon être : je prends racine.

Puis, riche d'une sève neuve, je croîs, je monte, je m'élève, je m'édifie. Tout en illusion.

Etourdi par le mirage, je suis tombé dans tes bras. Dans tes bras Sandrine, après un lustre passé dans la commune alcôve à vénérer un rêve brisé. Dans tes bras demeurés pourtant muets, croisés, lointains. Que me reste-t-il Sandrine ? Mes mots vers toi, porteurs de mes rêves les plus éclatants, sûrs messagers de mes jours perdus, ces jours désespérément reconstruits, réécrits, réinventés à la lumière de tes sourires, de tes yeux, de ton visage chéri.

Nous sommes en 1997, en fin d'année. Que reste-t-il de mes amours ? Le sang a séché, les coeurs se sont taris, l'eau à coulé sous les ponts.

Et toi Sandrine, tu demeures loin de moi, belle comme l'aube, l'onde et le vent.

188 - L'esseulée

Vous l'esseulée, vous le visage qu'on ne regarde jamais, les yeux qu'on ne croise pas, le coeur qu'on évite, vous l'épouse de l'indifférence, vous la jeune fille que l'on dit sans grâce et sur qui nul amant n'attarde son regard, un coeur bat pour vous.

Malgré, vous, malgré moi et malgré tout, je suis épris de votre pauvreté.

Les galants sur vous lèvent les yeux et passent, ne laissant ni fleurs ni compliments, et au bal votre bras demeure veuf, éconduit, tandis qu'on danse avec vos soeurs plus jolies tout en leur clamant mille fadaises...

Mais si tous dédaignent vos traits modestes, vous l'indésirable créature, vous la fleur unique semblable à aucune autre, tous ignorent vos dehors cachés d'oiseau blessé, à travers vos larmes versées sans témoin, vos soupirs dédiés aux jours vides qui durent, votre coeur cloîtré et vos yeux depuis toujours baissés, mariés avec la poussière, à cause de ce poids de tristesse sur vos paupières.

Que vous êtes touchante, et tellement belle, quand vous vous révélez si humble, le visage plein de langueur : vous ressemblez à un ange en détresse. Votre secret renoncement m'attire de la même manière qu'une terre sévère et inculte, si austère que le silence n'est pas silence, mais prière émanant des pierres et des ronces.

Vous avez pour moi le charme sûr de l'authentique mélancolie, et votre coeur que l'on néglige est une délicatesse que je vous demande de m'offrir parce que vos pleurs, pareils à une neige sur un paysage terne, donnent un prix à ces prunelles qui se posent sur moi.

Discrète et pudique, simple et sage, sans toilette, ni ruban, ni soie, votre grâce siège sur votre front nu. Et votre sourire qui me sera voué formera votre unique et sobre parure.

189 - Lettre d'amour à une jeune et laide bigote

Mademoiselle,

Permettez qu'un prétendant digne de votre chaste hymen se manifeste enfin. J'aime singulièrement vos grâces d'oiseau dépourvu d'ailes, vos airs d'ange déchu, votre vol de papillon sans mystère. Vous êtes un joli caillou, une sorte de diamant obscur au prix indéfini. Votre front dénué de lauriers vaut votre regard sans fard. Vous êtes d'ailleurs si vraie que l'artifice serait une offense à votre nature.

Votre authenticité inédite a les charmes bruts de l'amertume.

Vous êtes belle comme un rêve dont on ne se rappelle plus.

190 - Vertueuse et improbable

Je rêve d'une fille, qui serait bientôt une femme, dont le visage sage, doux et paisible se tourne vers moi, empreint d'un amour infaillible, profond, noble, un amour hors du commun. Son regard plonge dans le mien, et devine mon âme. La jeunesse, la grâce et la joliesse sont ses naturelles parures. Elle a la chevelure aux teintes douces d'automne ou aux éclats vifs du soleil, peu importe, et ses yeux vifs et clairs ont les reflets nets du ciel.

Son coeur est demeuré pur, son corps sans tache, et sa parole a plus de poids que l'or. Elle porte en elle le mystère des grands départs. Dans sa voix qui prononce mon nom, il y a le ton d'un ailleurs, un long rêve qu'elle ne dit pas, mais que l'on pressent. Son monde intérieur est une riche bohème. Son esprit est sûr, avisé, éprouvé, et son tempérament est prompt aux rêveries et à la mélancolie.

Son corps est fin, gracile, sa chair a les lignes délicates des nymphes, et ses formes sont généreuses. Sa vertu préservée m'est vouée tout entière. Elle a la force d'âme de ceux qui ont reçu le divin enseignement. Elle est fidèle, constante, mesurée. Elle aime l'honneur, l'humilité, la vérité. Elle rêve de gloire, et la mort n'est pour elle qu'un adversaire déloyal que méprise son âme éprise de lumière. Elle est honnête, sensible, saine. Elle brille par le coeur et par l'esprit. Elle a le goût du classicisme, des traditions et des connaissances séculaires. C'est une fille de bien.

Je ne connais pas son nom encore, mais existe-t-elle vraiment cette compagne imaginaire ? N'est-elle pas tout près de moi finalement ? Peut-être est-elle loin, trop loin dans l' irréel... Pourtant j'ose croire qu'un jour elle sera là. Je la reconnaîtrai, et elle me reconnaîtra. Cette fille, cette amante idéalisée et imaginaire, je l'aime déjà.

Je l'attends, comme j'attendrais un rêve.

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Qui est Raphaël Zacharie de IZARRA ?

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Oisif mélancolique, oiseau unique, ange joliment plumé, ainsi se présente l’auteur de ces lignes (une sorte de Peter Pan cruel et joyeux, mais parfois aussi un rat taciturne). Au-delà de cette façade mondaine, loin de certaines noirceurs facétieuses j’ai gardé en moi une part de très grande pureté. Dans mon coeur, un diamant indestructible d’un éclat indescriptible. Cet éclat transcendant, vous en aurez un aperçu à travers mes modestes oeuvres. Est-ce une grâce de me lire, pensez-vous? Osons le croire.