mercredi 12 juin 2013

163 - Les fagots



La vieille ployait sous le poids des fagots. Mais elle était robuste, dure à la tâche, âpre au gain. Sous la Lune je distinguais sa silhouette brisée, d'apparence si frêle. Avec son bois sec sur le dos, ses doigts crochus, son corps osseux, elle me faisait songer à un arbre mort.

Une vieille chouette en réalité.

Je lui adressai le bonsoir en la croisant à l'orée de la forêt. Promptement elle m'envoya au Diable en me menaçant avec son bâton, l'oeil méchant, un silex dans la voix : la vieille avait un caractère de chat sauvage. Depuis le temps que je la connaissais, j'avais toujours été séduit par cette sorcière qui vivait à l'écart du village. Solitaire et rebelle, intrépide et coriace, cette vagabonde de la nuit était un mystère.

Je la regardais souvent ramasser du bois, humble trésor de son foyer, et m'attardais ainsi jusque tard dans la nuit sur ce fantôme anguleux, sur cette ombre aux allures de fable. Tantôt je la comparais à un épouvantail en route vers les paysages morts et silencieux de la Lune, tantôt je me la figurais hôte des clochers, chevaucheuse des vents ou spectre des cimetières. Je voyais en cette glaneuse de bois un être fabuleux.

Elle rentrait tard dans sa chaumière sans confort, rapportant ses pauvres fagots. Peu après sa fenêtre s'éclairait au coeur de la nuit.

Avec sa maigre fortune sur le dos, son feu de misère, ses haillons d'un autre âge, la vieille me faisait rêver sous les étoiles.

VOIR LA VIDEO :

http://www.dailymotion.com/video/xymnbc_les-fagots-raphael-zacharie-de-izarra_news#.UVh-Chzy3ck

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Qui est Raphaël Zacharie de IZARRA ?

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Oisif mélancolique, oiseau unique, ange joliment plumé, ainsi se présente l’auteur de ces lignes (une sorte de Peter Pan cruel et joyeux, mais parfois aussi un rat taciturne). Au-delà de cette façade mondaine, loin de certaines noirceurs facétieuses j’ai gardé en moi une part de très grande pureté. Dans mon coeur, un diamant indestructible d’un éclat indescriptible. Cet éclat transcendant, vous en aurez un aperçu à travers mes modestes oeuvres. Est-ce une grâce de me lire, pensez-vous? Osons le croire.